du 30 août au 12 septembre 2014
par Alain Grèze
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L'Archipel des Sporades est un petit ensemble d'îles grecques du nord de la mer Egée. Il comprend onze îles dont seules quatre sont habitées. Skiathos et Skyros, ces deux îles extrêmes, sont éloignées de seulement 60 milles. Comme nous ne sommes pas des organisateurs de voyages touristiques, mais des voileux chroniques, il fallait trouver des distances à courir. Quelques îles voisines étaient à portée de voile pour autant que la météo nous le permette. J'avais rêvé d'accoster Thasos, Samothrace, Lesbos, Chios, mais j'ai dû limiter mes ambitions au bénéfice d'un gain de confort et de plaisirs. Les haltes baignades se sont multipliées au fil des eaux turquoise et au gré des envies, et les escales sont devenues un peu plus touristiques...
Albatros, loueur local et sous-traitant d'Océan évasion, nous accueille dès l'aéroport de Thessalonique pour nous conduire en bus jusqu'à Nikiti. Cette organisation nous permet, sur les précieux conseils de notre accompagnateur, d'acheter l'essentiel de notre avitaillement en cours de route. L'accueil assuré par le patron Stelios Pyrpilis et par notre interlocuteur privilégié Yannis Kyvernitis est d'une qualité inhabituelle. Leur parfaite maitrise du français nous facilitera la tâche à de nombreuses reprises.
Deux bateaux de 40 et 41 pieds attendent les quatorze croisiéristes. Odysseas bien entretenu est un bon bateau. Malheureusement Nafkratousa va se révéler moins séduisant avec une girouette-anémomètre en panne, un pilote automatique inopérant, un compas de route non éclairé, et deux ruptures de drosse de gouvernail. Heureusement ces désagréments, que l'esprit marin du bord saura surmonter, n'entameront pas la bonne humeur de l'équipage qui fera de cette croisière une réussite... comme d'habitude.
Le premier jour est une magnifique journée d'amarinage, poussés par un vent de trois degrés Beaufort sur une mer belle. Premier mouillage et première baignade dans un environnement superbe à Kannavitsa. Il faut pourtant continuer pour trouver un abri plus sûr pour la nuit. Porto-Koufos au fond de son immense baie très fermée est parfait. Après nous être amarrés, nous nous déplacerons en bout de quai pour plus de liberté et pour nous permettre aussi de prendre Odysséas à couple. La nuit est d'un calme absolue.
Ce lundi 1er septembre à 6 heures il fait encore nuit et une grosse navigation est prévue pour rejoindre Limnos sans escale possible. Faut-il réveiller Odysséas pour qu'il nous libère ? L'équipage de Nafkratousa, un peu joueur, décide de laisser dormir nos amis pour les emmener discrètement jusqu'en pleine mer. Lionel, skipper d'Odysséas que j'avais mis dans la confidence, a joué avec nous et s'est bien amusé des réactions éberluées de certains de ses équipiers lorsqu'ils sont montés sur le pont du bateau. Nous avons tous bien ri.
Cette belle journée de mer a alterné voile et moteur jusqu'à la séduisante baie de Myrina blottie au pied du Château. Dans l'Antiquité, le dieu du feu Héphaïstos était particulièrement vénéré des habitants de cette île volcanique. Nous y découvrons des grenadiers chargés de fruits et sur les hauteurs des fortifications, certains d'entre nous auront le plaisir de croiser un troupeau de biches.
Nous quittons cette escale très agréable pour rejoindre Efstratios 22 milles plus loin. L'étape est brève mais à notre arrivée, le port en travaux n'est pas accueillant. La zone abritée n'offre que quelques places jalousement gardées par les occupants compte tenu des prévisions météo de la nuit prochaine. Préférant la sécurité au confort, nous acceptons le conseil des autorités et choisissons le quai. Un amarrage à couple sur l'île de Sein m'avait déjà initié aux nuits blanches, mais cette fois nous devons lutter avec un quai dont la conception n'est pas adaptée aux voiliers. L'inconfort est pire. Nos pare-battages deviennent ridicules et les énormes pneus servant à l'amarrage des ferries suffisent à peine à nous protéger du béton. A la façon dont la houle nous écarte du quai pour mieux nous propulser sur celui-ci, nous avons l'impression qu'à chaque coup de boutoir Nafkratousa peut se retrouver quille au sec. Heureusement nous quittons ce quai maudit à la première lueur du jour pour prendre le petit déjeuner bien plus confortablement en mer.
Nous « voilons » bien sous cinq degrés Beaufort de sud jusqu'à 25 milles de Skyros. Cette île est la plus méridionale et la plus étendue de l'archipel des Sporades. Elle est enchanteresse par sa beauté incroyable, sa nature, ses plages, ses vestiges à demi-engloutis par les eaux cristallines, son silence et l'hospitalité de ses habitants. C'est l'idée même qu'on se fait d'une île grecque traditionnelle. Nous consacrons le jeudi 4 à sa découverte qui nous laissera en mémoire les sites de Pefkos, Fokas, Atsitsa, la baignade à Petrou, le restaurant de Palamari, le site magnifique de la ville de Skyros, Pouria, Ermoulaos.
Un petit vent de sud-est sur mer belle nous éloigne de Linaria en nous poussant vers Alonnisos à 9 heures de route. Mon ami Lionel a envie d'une halte baignade sur Skantzoura quasiment à mi-chemin. Répertoriée de façon aléatoire d'une carte à l'autre, Elena Bay se révèle être un mouillage idyllique pour une halte déjeuner et baignade. Merci Lionel !
Arrivés à Patitiri à 19 heures, nous larguons les amarres le lendemain à 10 heures pour une petite journée de navigation de 6 heures vers Skiathos. La faible distance à courir nous laisse du temps à Panormou puis à Tsoungria pour des baignades interminables où j'ai bien du mal à récupérer « sirènes » et « tritons ». L'ambiance est donnée pour l'apéritif dinatoire de Koukounaris qui se déroulera dans la chaleureuse tradition festive d'APC. Les vapeurs de la fête seront finalement dissipées par le gros orage de la nuit. Avant de reprendre la mer je monte en tête de mât pour réparer la girouette en panne depuis Nikiti. Le séchage du connecteur baignant d'humidité s'avère ne pas être la cause majeure de la panne. Nous poursuivrons donc sans girouette.
Ce jour « du seigneur » ne voulait pas qu'on navigue. Une panne de barre à une heure de Skopélos nous contraint à finir l'étape à la barre de secours. Même si ce n'est pas ma première expérience, je suis content qu'il ne me reste qu'une heure de route car une barre de secours est physiquement épuisante. Vingt-six heures sont nécessaires à sa réparation ! Comme nous avions prévu de relâcher sur cette île, nous regretterons surtout le temps perdu aux tracasseries induites.
La météo de ce mardi 9 septembre est idéale pour reprendre la mer et le mouillage « baignade » de Steni Vala, pris précautionneusement avec orin et bout à terre pour se rapprocher de la côte rocheuse, nous replonge dans la réalité de la dure vie de plaisancier. Plus loin la baie de Panagia sur l'île de Kyra nous accueille belle et paisible. Les baignades se multiplient et s'éternisent. Plus faim ? Plus soif ?... Les équipages sont-ils malades ? Il est minuit lorsque de mystérieuses silhouettes se glissent furtivement dans les reflets argentés du clapotis de l'eau sous les rayons de la pleine lune. Le silence filtre quelques chuchotements et rires discrets... Chuuut ! Tout va bien...
Mercredi est consacré à la flânerie et à la détente. Sur la route de Planitis située au nord de l'île de Kyra, ma curiosité est attirée vers le passage de Sfika dont le guide Imray vante la beauté du mouillage par beau temps. Le temps est idéal et le site magnifique mais les cartes marines sont erronées. La quille et le safran talonnent. A ce moment je m'en veux de n'avoir pas su faire demi-tour à temps. L'environnement ne présente aucun danger et est propice à une manœuvre de désengagement en douceur mais le safran, seul au contact, se dégage en glissant sur le rocher. Aussitôt mouillés en baie de Planitis, la plongée de contrôle qui s'impose nous révèle un léger rabotage du safran en partie basse. L'état de ce dernier ne présente aucun danger pour la suite de notre périple, mais exige un rapport de mer sur lequel l'expertise du bateau s'appuiera.
Nous sommes en phase de pleine lune et la météo est presque idéale pour envisager une navigation de nuit. Presque idéale car Perkins devra pallier la paresse d'Eole. Certains équipiers sont enthousiastes, d'autres ronchons pour ne percevoir qu'une fatigue inutile organisée par une Rose de quarts historiquement maudite...
La nuit est bien établie lorsque nous quittons Planitis à 21h30. Je découvre que l'éclairage déficient du compas rend ce dernier illisible. Nous nous passerons donc du compas de route pour avancer avec les étoiles. Les plus stressés vont rapidement prendre du plaisir à barrer aux seuls repaires de la voute céleste. Agnès et Pascale se distinguerons sur le pont bien au-delà de leur quart respectif. Ce constat m'a procuré un certain plaisir. Je les en remercie.
A 4h30 il fait encore nuit quand nous jetons l'ancre dans la rade de Porto Koufos toujours aussi paisible. La deuxième baie au sud de Porto Karras, que nous touchons pour le déjeuner, est tellement sympathique que j'envisage d'y passer la nuit. Comme les conditions sont idéales pour une navigation plaisir, nous allons tirer quelques bords autour de l'île de Kelyfos. Notre plaisir est de courte durée. Jean-Paul à la barre me signale un manque de fluidité du gouvernail. Une nouvelle rupture de drosse nous oblige à regagner notre port d'arrivée un jour plus tôt. Le lendemain, après une réparation rapide et semble-t-il efficace, nous tirons nos derniers bords avec Denis et Jean-Paul au large de Nikiti. Le bateau a l'air parfait...
Merci Agnès, Christian, Daniel, Denis, Geneviève, Georges, Hélène, Jean-Paul, Jean-Pierre, Lionel, Nicole, Pascale et Yves pour avoir contribué à l'ambiance extraordinaire de cette croisière. Merci les amis.
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